Reggards : Le Petit Prince lislois du Blues

À seulement 17 ans, Enzo Cappadona fait vibrer les scènes avec son blues incandescent, né d’une passion précoce et d’un travail acharné. Guitare à la main, ce jeune prodige originaire de Lisle-sur-Tarn enchaîne les rencontres prestigieuses et trace un chemin singulier, entre héritage familial, inspiration des grands noms et une volonté farouche d’exister par la musique. Portrait d’un artiste en devenir, déjà profondément habité par son art.

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Il y a parfois des événements anecdotiques qui, bien plus tard, s’avèrent déterminants. Pour Enzo Cappadona, tout commence il y a une dizaine d’années. Il a sept ans et passe ses vacances chez ses grands-parents près de Marseille. Son grand-père, alors âgé de 70 ans, décide de se mettre à la guitare. Curieux, Enzo l’imite. Très vite, son aïeul comprend que quelque chose se passe. « Je réussissais à reproduire les accords qu’il me montrait », se souvient Enzo. Le goût de la musique ne le quittera plus.

Ses premiers cours, il les prend au CLAE de Lisle-sur-Tarn, avec Alain Néaud, guitariste rock. Puis direction la MJC, où il rencontre Irakli Khutschvili, talentueux guitariste de jazz géorgien. À ses côtés, il apprend les gammes, affine sa technique, et découvre le blues.
« C’est la meilleure musique pour improviser », lui explique son professeur, qui lui fait écouter BB King et Stevie Ray Vaughan. Rapidement, la guitare classique cède la place à l’électrique.

Le talent, ça se travaille.


Irakli Khutschvili devine très vite qu’Enzo a un bel avenir musical. Il le pousse à travailler dur. Enzo met du coeu à l’ouvrage. Obstiné et perfectionniste, il s’impose une discipline : « Chaque jour, je faisais 45 minutes de gammes et une à deux heures d’improvisation. ». Il n’est pas né dans une famille de musiciens, mais la musique est bien présente à la maison. « Mes parents écoutaient beaucoup de musique : blues, funk, années 80. » Lui, il est fan de Michael Jackson, écoute AC/DC. Pour sa toute première scène à Lisle, il joue Highway to Hell.

Les concerts s’enchaînent, les premières formations naissent, essentiellement instrumentales. Mais un groupe sans chanteur… est-ce vraiment un groupe ? Alors Enzo se lance. Il ose Purple Rain de Prince. « Je ne savais vraiment pas chanter à l’époque », dit-il en riant. Qu’importe, il s’accroche, progresse. Il participe aux jam sessions organisées par Bluz Track Production à Albi. Là, Pascal Delmas, batteur expérimenté, le repère.

Il a tout juste 11 ans lorsque The Voice Kids le remarque grâce à ses vidéos en ligne. Sans passer par les sélections régionales, il intègre directement le casting, jusqu’aux battles. « J’avais un profil atypique : un gamin qui joue du blues, ce n’est pas courant. »
C’est le début de la célébrité. A l’école d’abord, puis la Mairie de Lisle-sur-Tarn lui remet la médaille de la ville. On lui propose même de participer au casting d’une comédie musicale… qu’il décline.

Une scène, une famille musicale

C’est aux côtés de Pascal Delmas qu’un nouveau projet voit le jour. Le batteur réunit autour d’Enzo le bassiste Laurent Basso et Fabrice Joussot à la guitare et au chant. « Fabrice m’a beaucoup appris sur le plan scénique. Il m’a aidé à aller chercher le public, à m’ouvrir. » Réservé dans la vie, Enzo se transforme sur scène : « Je suis dans mon élément, à l’aise, j’aime faire le show. »

Au fil des années, il croise de nombreux artistes. À 12 ans, il accompagne en direct à la radio l’une des légendes du blues, Lucky Peterson. « Il voulait que je monte sur scène pour son concert, mais comme j’étais mineur, son agent n’a pas voulu prendre de risque. » Ce n’est que partie remise : il jouera plus tard avec Michael Jones devant 3 500 spectateurs. « Très attentif, il m’a donné pas mal de conseils. » John Primer, Neal Black, et tant d’autres suivront.
Neal Black, d’ailleurs, ne tarit pas d’éloges : « Enzo a le blues dans le sang ». Ce n’est donc pas un hasard si l’artiste américain participe aujourd’hui à l’album d’Enzo.

Le grand saut

Depuis quelques années, le jeune Lislois ne se contente plus de reprendre les morceaux des autres. Il compose, écrit, arrange. En avril 2025, il passe quelques jours en studio à Poitiers pour enregistrer ses titres, entouré de ses musiciens Laurent Basso, Léo Jimenez (batterie), mais aussi Arnaud Fradin et Neal Black.

La sortie de l’album est prévue pour octobre. Mais avant cela, une autre étape l’attend : le bac, en juin. Et ensuite ? « Pendant un an, je vais me consacrer uniquement à la musique, et voir où cela me mène. »

Des doigts de magicien pour enchaîner les riffs, une tête bien faite et les deux pieds sur terre : Enzo garde le cap. « Le chemin est encore long. Il faut cultiver sa passion et travailler encore et toujours pour se donner les moyens de réussir. » Même ici, loin des grandes scènes du blues, on peut percer. Dans sa chambre, des guitares accrochées au mur, celle de son arrière-grand-père, sa première guitare électrique, mais pas de posters de ses idoles. Seul, un album vinyl de B.B. King trône sur le bureau, le respect des grands.

Le Petit Prince du blues trace désormais sa route. Il est artiste à 100%, incarne chaque note, chaque mot, chaque émotion créant un univers musical unique.